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9 avril 2021
Le marché obligataire a connu un virage décisif ces derniers mois. Les investisseurs ont tourné leur attention vers la vigueur de la reprise économique au moment même où les banques centrales accéléraient leurs achats d’obligations. Les taux d’intérêt à long terme ont par conséquent plus que doublé pour revenir à leurs niveaux d’avant la pandémie. Cela pourrait nuire aux actions à multiple élevé, dont les fortes primes ne sont justifiées que par des taux d’intérêt ultrabas. Nos portefeuilles ont évité les risques inhérents aux obligations à long terme et aux actions les plus chères, stratégie qui, selon nous, continuera de porter ses fruits.
Les taux d’intérêt ont atteint des creux historiques partout dans le monde en 2020, les banques centrales ayant instauré des mesures de relance exceptionnelles en réaction à la récession provoquée par la pandémie. Suivant l’exemple des autres banques centrales, la Banque du Canada a abaissé son taux directeur à presque zéro et acheté des obligations sur le marché secondaire. Le taux de l’obligation du gouvernement fédéral à 30 ans est ainsi descendu pour la toute première fois sous les 1 % en mars et juin dernier (graphique 1). Parallèlement, les actions de l’économie numérique ont vu leurs cours exploser, à la fois parce que leurs produits et services ont vu leur demande s’accroître (conséquence directe de la pandémie) et parce que la chute des taux d’intérêt a fait grimper leurs primes.
Au cours de l’été 2020, cependant, l’état d’esprit des investisseurs a commencé à changer. Face à l’amélioration décisive des données économiques mondiales et aux résultats prometteurs des essais de vaccins, les investisseurs ont commencé à intégrer l’idée que la pandémie finirait par prendre fin. Ce changement d’attitude s’est également manifesté au niveau politique : économistes, gouvernements et décideurs ont délaissé le conservatisme budgétaire et choisi plutôt de recourir aux déficits budgétaires pour stimuler la croissance. Le plan de relance de 1 900 milliards de dollars annoncé par Joe Biden, qui s’ajoute aux 900 milliards déjà approuvés par son prédécesseur en décembre dernier et aux 2 800 milliards injectés en mars-avril 2020, est conforme à la nouvelle orthodoxie consistant à emprunter à taux bas pour soutenir l’activité économique.
Le creusement des dépenses publiques et le recours massif à la planche à billets ont ranimé les craintes inflationnistes. Cette nouvelle dynamique a fait remonter les taux d’intérêt. Le taux de l’obligation du gouvernement du Canada à 30 ans est ainsi passé de 0,9 % à 2,0 %, son niveau d’avril 2019 (graphique 1). L’incidence sur les prix des obligations a été considérable : au cours des sept derniers mois, le rendement de l’obligation à 30 ans a été de ‑22 %.
L’accentuation de la courbe des taux a également eu un effet secondaire sur les actions à multiple élevé. L’an dernier, nous avons expliqué en détail comment la chute des taux obligataires a dopé les ratios cours/bénéfice (C/B), en particulier dans le secteur technologique. Les actions dont la valeur économique dépend davantage des bénéfices, flux de trésorerie et investissements futurs réagissent aussi davantage à une baisse des taux d’intérêt. Une diminution des taux d’intérêt ou d’actualisation, autrement dit du taux auquel les flux de trésorerie futurs sont actualisés pour obtenir leur valeur actuelle, fait monter cette dernière. Pour résumer, à l’heure où les taux d’intérêt frôlent 0 %, un dollar de demain vaut presque autant qu’un dollar d’aujourd’hui. Une augmentation du taux d’actualisation a l’effet inverse.
Si les taux d’intérêt cessent de baisser et commencent, de fait, à intégrer les attentes d’accroissement de l’inflation et des niveaux d’endettement, cela pourrait nuire encore plus aux actions à multiple élevé que les investisseurs ne le pensent. En effet, les taux d’intérêt ultrabas pourraient ne pas expliquer à eux seuls les primes élevées que les investisseurs sont prêts à payer. Les valorisations anormalement élevées de certaines actions cotées au NASDAQ sont-elles donc en partie imputables à une « exubérance irrationnelle »? Qu’arrivera-t-il si les investisseurs réalisent 1) que la période de baisse des taux obligataires touche à sa fin et 2) que la croissance des bénéfices de nombreuses sociétés à prix raisonnable liées au cycle économique se renforcera sous l’effet des mesures de relance et de l’expansion économique cette année et l’an prochain, ce qui réduira voire inversera l’écart de croissance des bénéfices par rapport aux actions de croissance?
Malgré les prévisions de hausse des revenus et des bénéfices plus rapide que celle des indices de référence, nos portefeuilles d’actions continuent de se négocier bien en deçà de ces derniers (tableau 2).
Nos portefeuilles d’actions canadiennes, d’actions internationales et des marchés émergents sont diversifiés et structurés autour de sociétés bien valorisées, qui sont des chefs de file mondiaux dans leur secteur et qui présentent un excellent profil de croissance. En voici des exemples :
Depuis déjà un certain temps, nous protégeons nos portefeuilles contre les valorisations excessives des obligations à long terme et des actions à multiple élevé. Les gouvernements continuent d’accélérer leurs mesures de relance budgétaire à l’heure où les banques centrales admettent qu’elles sont prêtes à laisser l’inflation dépasser légèrement leur taux cible habituel de 2 %. Nous estimons que le maintien d’une duration courte dans nos portefeuilles obligataires est la meilleure stratégie dans le contexte actuel. Les taux obligataires pourraient continuer de progresser, ce qui pourrait occasionner d’autres pertes importantes aux porteurs de titres à long terme. À notre avis, nos portefeuilles d’actions offrent des occasions de placements diversifiés dans des sociétés bien valorisées qui présentent un profil de croissance des bénéfices solide. Les investisseurs à long terme devraient continuer à récolter les fruits de leur patience.
Dans ce texte, le « dollar » est le dollar US, sauf indication contraire.
La liste de tous les achats et ventes effectués dans ces portefeuilles au cours de la dernière année peut être fournie sur demande. Les transactions mentionnées ne représentent pas tous les titres achetés ou vendus dans les portefeuilles au cours du dernier trimestre. On ne doit pas présumer qu’un placement dans ces titres a été ou sera rentable.
Les renseignements et opinions contenus dans le présent document sont donnés à titre indicatif seulement, sont susceptibles de changer et ne visent pas à fournir des conseils d’ordre comptable, juridique ou fiscal ou des recommandations en matière de placement, et ne doivent pas être utilisés comme tels. Les sociétés ne sont mentionnées ici qu’à titre d’illustration et ces mentions ne doivent pas être considérées comme une recommandation d’achat ou de vente. Il ne faut pas supposer qu’un placement dans ces sociétés a été ou serait rentable. À moins d’indication contraire, les renseignements que contient le présent document sont présentés aux dates indiquées. Bien que ces renseignements soient considérés comme exacts à la date où ils ont été préparés, Letko, Brosseau & Associés Inc. ne peut garantir qu’ils sont exacts, complets et à jour en tout temps.
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